Un porche d’entrée en façade sud, un bow-window en façade ouest et une rotonde en hémicycle en façade nord viennent se greffer au corps principal, cette dernière rappelant celle de La Dombarière à Ecully, propriété Gindre construite en 1892 (et démolie en 1979).

Les façades sont traitées sobrement : soubassement en pierre de Villebois, parements en enduits texturés (réalisés à la tyrolienne), frise décorative de mosaïques, larges forgets, tuiles et épis de faitage ; avec un riche équilibre dans l’usage de la polychromie (badigeons sur enduits, appuis et linteaux, peintures sur menuiseries, zinguerie, forgets, décors à faux-joints, etc).

La composition des façades suggère l’organisation fonctionnelle de la maison : pièces de vie publiques ouvertes sur le parc (baies tripartites, bow-window et rotonde), pièces de vie privées également ouvertes sur le parc (baies classiques), et pièces de service (petites baies) sur rue.

La villa de Marius Berliet, riche industriel et pionnier de l’industrie automobile française est un édifice emblématique du patrimoine du XX^e siècle mêlant la richesse de l’Art Nouveau à un style traditionnel local.

Elle se compose aujourd’hui de la villa et de la maison du gardien construites par Paul Bruyas en 1911, de son extension construite par Paul Senglet en 1928, de l’aile les reliant construite par René-Yves Bornarel en 1965. Joseph Linossier dessina son parc avec allées sinueuses et pelouses, ponctuées de bassins ornés de rocailles, roseraie et fabriques. Marius Berliet choisit lui-même les arbres, mêlant à des essences indigènes des arbres fruitiers et espèces décoratives. Joseph Linossier réalisa quelques années plus tard avec Achille Duchêne le jardin du château de Lacroix Laval à Charbonnières.

L’ensemble-ilôt est clos par un mur périphérique surmonté ponctuellement d’une grille de clôture. La maison du gardien servait également de remise à autos au rez-de-chaussée, accessible depuis la rue Pascal.

La maison principale s’élève sur quatre niveaux (sous-sol, rez-de-chaussée surélevé destiné aux pièces de réception, premier étage pour les chambres et un niveau de combles). Et est couronnée à l’angle sud-ouest par une tour-belvédère accessible depuis l’étage des combles, ouverte sur l’extérieur par de grandes baies accostées de colonnes doriques.

En 1928, la maison est agrandie, par Paul Senglet, pour les besoins de la famille. Une aile est ajoutée au nord-est et un second garage au sud-est, entraînant la création côté rue Pascal d’une cour intérieure de service.

Paul Senglet, pour la construction de l’aile nord reprend la composition de la maison originelle, les dessins de baies (modénature, dimension des ouvertures) et leurs finitions, à l’exception du soubassement et des lucarnes à deux versants et demi-croupe d’un tout autre style. Le béton et le ciment moulé (appuis de baie) sont ponctuellement utilisés.

En 1965, l’extension de l’architecte René-Yves Bornarel relie l’aile nord de P. Senglet à la maison du gardien de P. Bruyas. En béton, elle est composée d’un seul niveau surmonté d’une toiture plate non accessible.

En 1984, l’architecte Malapert construit un local d’archives en sous-sol à l’emplacement de la roseraie, alors remplacée par un boulodrome.

La Villa Berliet s’inscrit dans une lignée de constructions à Lyon, réalisées pour de grands industriels, qui associent vernaculaire et courants nouveaux. L’édifice est l’image à la fois d’une architecture traditionnelle locale conçue par des maîtres d’œuvre lyonnais (Paul Bruyas pour la construction de la maison principale, Paul Senglet pour l’extension et Joseph Linossier pour le parc) et également d’un mouvement artistique en plein essor véhiculé par des artistes nancéiens (l’ébéniste Louis Majorelle et le maître-verrier Jacques Grüber) : l’Art Nouveau.

Majorelle conçoit l’aménagement des pièces de la villa Berliet, guidé par un thème décoratif principal qui est celui de la pomme de pin. Il réalise selon le style Art Nouveau : l’entrée avec son plafond en stuc finement sculpté de fleurs et son sol en mosaïque, le bureau de Marius Berliet composé de lambris et meubles en noyer, et éclairé par des tulipes en pâte de verre de part et d’autre de la glace couronnant la cheminée, l’escalier principal à deux volées et galerie haute surplombant le vaste ensemble, la salle à manger qui possède une cheminée en noyer, rehaussée de cabochons en pâte de verre sous forme de fleurs, réalisés par les frères Daum.

Les vitraux de la villa Berliet ont été choisis sur catalogue. Leurs décors s’inspirent des motifs décoratifs choisis par Marius Berliet et Louis Majorelle.

La villa a connu plusieurs campagnes de construction mais aucune restauration générale connue à ce jour. L’intérêt patrimonial qu’elle représente et l’entretien soigné réalisés par ses propriétaires, aujourd’hui la Fondation de l’automobile Marius Berliet, a permis son inscription au titre des Monuments historiques depuis 1989. La restauration du clos et couvert est divisée en 3 phases dont les travaux seront répartis entre 2022 et 2026.

Phase 1 : Sécurisation et restauration des ouvrages de maçonnerie : rotonde, bow-window, balcon du 2è étage, balustrade du porche d’entrée et linteau du belvédère ainsi que consolidation de l’angle sud-ouest du mur de clôture.

Phase 2 : Restauration des façades et des couvertures de la villa 1911.

Phase 3 : Restauration des façades et des couvertures de l’extension 1928.

La villa Berliet (maison principale et extension de 1928) a préservé la quasi-totalité de ses dispositions d’origine. Le projet a pour objet la restauration du clos et couvert de la Villa dans le respect et la restitution de ses dispositions d’origine : mise en œuvre, matériaux, polychromie. Seuls les ouvrages en trop mauvais état sont prévus remplacés à l’identique. Une première phase de travaux a été menée en collaboration avec le cabinet STUDIOLO au premier trimestre 2021 en vue de la reconnaissance des ouvrages (mur de clôture et rotonde), la caractérisation des matériaux et des essais de nettoyage et de consolidation des enduits.

Les modifications tardives nuisant à la présentation globale de l’édifice, comme l’ajout de doubles fenêtres ou faux-plafond en dalles de 60x60cm dans la rotonde, seront supprimées.
La véranda sera restituée à son premier état : sol en mosaïque, mur en enduit ocre et frise en mosaïque (découverte lors des sondages en 2021) en partie haute des murs, plafond plâtre sous hourdis de machefer existant.

Les essais de restauration des enduits réalisés par l’équipe STUDIOLO ont permis d’obtenir des résultats satisfaisants sur la possibilité de conserver a maxima les enduits 1911 et 1928 existants. En respectant un protocole précis de nettoyage par micro-abrasion à sec, les dépôts existants peuvent être dégagés de façon satisfaisante quel que soit l’orientation et le niveau d’encrassement initial. Certaines zones trop abîmées devront cependant être purgées et restituées. A l’identique de celui réalisé en 1928 pour l’homogénéisation des façades, un badigeon sera mis en œuvre sur l’ensemble des enduits. Des tests d’application seront réalisés afin de redonner aux façades leur tonalité de 1928.